Le dimanche 31 octobre après-midi à Marseille, la 3e conférence organisée par le MCC a réuni Pierre Blanc, membre du think tank « Espérance et algorithmes », Eric Charmetant, jésuite, théologien et docteur en philosophie, et Carl Lauron, fondateur de la société marseillaise Buyco spécialisée dans l’optimisation du transport maritime, autour du thème « Algorithmes, intelligence artificielle, automatisation… : un nouveau monde du travail, des raisons d’espérer ». Pierre Blanc nous livre ci-dessous son regard sur la question.

Les prophéties les plus extravagantes circulent sur l’emploi, les métiers ou sur les compétences de demain. Vous entendrez dire par exemple que 85 % des métiers de demain n’existent pas aujourd’hui. Un tel chiffre est asséné à dire d’experts. Les compétences de demain reposeraient sur la créativité, la curiosité, l’empathie, la communication ou la collaboration. Comme le suggérait en son temps l’économiste britannique David Ricardo (1772-1823), il serait donc souhaitable de se spécialiser là où les machines ne sont pas aujourd’hui performantes. Certains intellectuels imaginent un monde bipolaire : d’un côté les Dieux, de l’autre les inutiles. Ces prédictions sont assises sur le postulat non démontré et critiquable, selon lequel les machines vont investir le marché du travail sans interventionnisme des États et sans réaction des citoyens.

Ces questions autour du travail, des métiers, des compétences et de l’emploi ne datent pas d’hier. Elles refont surface dès que des performances technologiques sont remarquables. De telles questions ne souffrent d’aucun pourcentage, d’aucune probabilité ou taux d’erreur, tout simplement parce qu’il s’agit bien d’hommes et de femmes en chair et en os. Une personne est une et indivisible, et en aucun cas un pourcentage. L’utilisation exclusive de chiffres pour parler d’individus devrait réveiller notre esprit critique.

Pour rappel, les machines réductrices d’emplois ou de métiers ne s’autosaisissent pas. Elles résultent bien d’un choix de dirigeants, d’êtres humains et d’une vision de la société. Les progrès technologiques nous poussent à réfléchir et à agir. Ce moment est bien différent des précédents : ces outils se diffusent aujourd’hui dans toute la société alors qu’avant ils ne passaient pas la porte des laboratoires de recherche.

Simone Weil concluait en 1936 un de ses textes (La vie et la grève des ouvrières métallos (sur le tas), Simone Weil – 10 juin 1936) par cette citation : « L’avenir le dira ; mais cet avenir, il ne faut pas l’attendre, il faut le faire. ». Nous sommes donc tous responsables. Faites-vous votre propre opinion en appliquant les outils d’IA à votre propre activité. En prenant soin du travail, nous prenons soin de nous. Alors, au boulot !

Pierre Blanc, président fondateur d’Athling