Faire chacun sa part

L’urgence vitale de réduire l’impact des activités humaines sur l’environnement dont elles dépendent incite parfois les plus pragmatiques d’entre nous à qualifier de “naïfs”, “inutiles”, voire “contre-productifs” ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler “les petits gestes”.  Si nos gestes sont inutiles, si nous sommes totalement impuissants, nous pourrions être tentés de nous reposer sur l’idée d’un pouvoir fort qui ferait à notre place ; ce qui ne serait au final ni raisonnable, ni rassurant, ni porteur de vie. Aussi, malgré le vertige que cette situation induit, il semble important d’attester du rôle réel que les actions individuelles ont également à jouer dans le processus démocratique de lutte contre le dérèglement climatique anthropique. En 2019, le cabinet de conseil Carbone, publie l’étude “Faire sa part?” qui tente d’évaluer la fraction de la réduction de l’empreinte carbone nationale à attribuer au Français moyen. Ceci a comme objectif d’imaginer être en mesure de respecter les accords de Paris. Elle conclut qu’environ un quart de cet effort dépendrait des individus, le reste étant dû au modèle social, économique, industriel, agricole, technique et politique qui les environne.

Le paradigme technocratique qui stimule nos sociétés contemporaines présente l’avantage d’objectiver avec précision ces relations de causes à effets éclairantes. Pour autant, il a une fâcheuse tendance à nourrir abondamment la satisfaction que nous tirons de notre pouvoir de production, lui-même principal moteur de la destruction environnementale en cours. Dans la période d’incertitude que nous traversons, la réhabilitation et la valorisation des petits gestes sont probablement l’un des plus sûrs moyens de rendre sa part de responsabilité, sa capacité d’action et sa dignité à toute personne, de la plus humble à la plus ambitieuse. C’est parce que chaque vie a son importance dans l’organisation du monde qu’elle doit pouvoir manifester son interdépendance dans les changements bouleversants à venir.