Au boulot !

Peut-on réinsérer les riches ? Dans l’émission Les Grandes Gueules sur RMC, le député écologiste François Ruffin met au défi l’avocate et chroniqueuse Sarah Saldmann de vivre trois mois avec 1300 euros. À sa grande surprise, celle-ci accepte de tenter une courte expérience devant la caméra de Gilles Perret.

On la voit tour à tour livrer des colis en souliers à talon haut, peler des harengs à Boulogne-sur-Mer, poser la fibre en bleu de travail à Grigny… Pour une bourgeoise BCBG, l’expérience est rude ! D’autant que François Ruffin en rit volontiers. Mais certaines rencontres sont poignantes. L’avocate découvre la dignité d’une assistante de vie qui se réjouit du sourire des personnes âgées. Elle se lie d’amitié avec Nathalie, licenciée pour longue maladie et trouvant un travail à sa mesure dans un territoire zéro chômeur. Elle admire un ancien charpentier, victime d’un accident du travail, qui passe ses journées à chercher bénévolement des légumes pour le Secours populaire.

Certains critiques trouvent que François Ruffin en profite pour redorer son image de député des classes populaires. Ils regrettent ses commentaires satiriques sur l’addiction de sa comparse aux signes extérieurs de richesse : bijoux, montres Rolex, robes de luxe. Ils regrettent que la rupture anticipée du contrat entre le député et l’avocate fasse de cette dernière une anti-héroïne. Mais les véritables héros du film sont les travailleurs pauvres, qui acceptent le dialogue avec une chroniqueuse qui les traitait sur RMC – et qui continue les traiter sur CNews – «  d’assistés ».

Ce film met en scène des “visitations” que chacun d’entre nous devrait faire plus souvent pour échapper à ses propres préjugés de classe, et pour découvrir la belle vertu sociale de la compassion. Seule une rencontre de personne à personne permet d’expérimenter notre commune humanité.

Bertrand Hériard, aumônier de secteur à Marseille