Le code du capital

Comment la loi fabrique la richesse capitaliste et les inégalités ?

Katharina Pistor

Katharina Pistor, professeure de droit comparé à l’université de Colombia, raconte comment la terre, l’entreprise, la connaissance, la dette, la nature, les données personnelles ont été progressivement privatisés par des avocats qui élaborent un code public, validé ensuite par la jurisprudence ou par la loi.

En effet, seul le droit peut conférer les attributs de priorité en cas de faillite, de durabilité dans les successions, de convertibilité en monnaie nationale et d’universalité des biens. La possession de richesse est souvent codée en droit anglo-saxon, qui s’impose à celui des autres nations par sa souplesse et sa force économique. Quelques gros cabinets internationaux règlent leurs différents par des procédures d’arbitrage de plus en plus privés. Ce droit conçu par et dans l’intérêt de riches acteurs privés permet l’envol des inégalités et les crises à répétition où les États sont obligés de venir à leur secours, selon le principe du « too big and too interconnected to fail ! ».

Un chapitre fait l’autopsie institutionnelle de Lehmann Brothers. Un autre explique comment les traders en produits dérivés ont obtenu des exceptions aux règles financières (safe habors) en cas de faillite. Un autre développe comment un laboratoire a breveté une partie du génome humain en allant plus vite que la cour suprême américaine.

Dans La grande transformation (1944), Karl Polanyi avait réfléchi aux racines historiques ayant conduit à la crise de 29 et à la guerre mondiale. En actualisant cette thèse, le livre permet de comprendre pourquoi les perdants d’aujourd’hui expriment leur colère en votant Donald Trump, Jair Bolsonaro ou Javier Miley.

L’auteure esquisse la manière de concevoir un autre code qui remettrait le droit commercial et financier au service du bien commun, avant qu’une montée sans précédent des inégalités ne se règle par une nouvelle guerre mondiale.

Bertrand Hériard, aumonier de secteur à Marseille