Le titre du livre se veut dérangeant, car nous sommes plus ou moins conditionnés pour croire que la « loi du plus fort » est la seule loi qui régit le monde. Mais Pablo Servigne et Gauthier Chapelle, tous deux agronomes et biologistes, démontrent que la vie, dans sa diversité, ne pourrait pas exister sans coopération, y compris entre espèces différentes. Belle invitation à changer notre regard.
« Compétition, expansion infinie et déconnexion de notre monde vivant, ces trois mythes fondateurs de notre société » expliquent notre aveuglement sur la place de l’entraide. Or celle-ci existe partout dans le monde végétal, dans les micro-organismes, chez les animaux. S’associer pour survivre est indispensable et les auteurs, nombreux exemples à l’appui, rappellent que, plus le milieu est hostile, plus se développent ces pratiques de coopération.
Pour les humains, nous voyons bien l’entraide spontanée à l’échelle des individus et des petits groupes. Les auteurs nous invitent à comprendre les fondements de cette entraide, faite à la base de réciprocité. Mais, en passant aux groupes, interviennent vite d’autres facteurs, comme la réputation, les récompenses et punitions, les normes sociales.
De là, se dégagent les conditions à réunir pour que l’entraide fonctionne par adhésion dans un groupe plus important et sont posés les principes d’une « bonne gouvernance », fondée sur le partage de sentiments de sécurité, d’égalité et de confiance. Mais ce n’est pas un livre naïf, car les questions de compétition entre groupes, de limites de taille des groupes, de risque de renfermement des groupes trop solidaires sont aussi analysées.
Ce livre aux multiples facettes est à la fois une passionnante source d’informations dans le domaine des sciences de la vie et de la sociobiologie et un appel à construire de nouveaux modes de fonctionnement à l’échelle du monde pour affronter les défis d’aujourd’hui.
Arnaud Laudenbach