SciencesPo Les Presses, 2018
111 pages
lu
L’Église catholique est-elle anticapitaliste ?
Prêtre dominicain et agrégé de sciences économiques et sociales, Jacques-Benoît Rauscher nous invite, dans ce livre, à aller au plus profond de l’analyse de la doctrine sociale de l’Église, à partir d’une lecture minutieuse, une véritable enquête, des textes pontificaux qui ont structuré cette doctrine, de Rerum Novarum en 1891 à Amoris Laetitia en 2016.
L’auteur note que le capitalisme n’y est mentionné que par étapes, par touches, et, en traitant soit de ses aspects économiques, soit de ses fondamentaux éthiques, mais rarement les deux dans leur interaction. Et ceci a été à l’origine d’un manque de lisibilité de la position de l’Église.
S’agissant des seuls aspects économiques, l’Église a reconnu les effets positifs du capitalisme, tels que son rôle dans les échanges entre les hommes, sa capacité créatrice ou ses impacts sur les conditions de vie. Mais elle a fait aussi des mises en garde sévères sur ses excès, sans pouvoir d’ailleurs définir où s’arrête le capitalisme acceptable.
Mais vis-à-vis des fondamentaux du capitalisme, son ethos, la plupart des textes pontificaux après Rerum Novarum sont très critiques, notant leur incompatibilité avec le message de l’Évangile et avec la tradition de l’Église.
Analysant les tensions entre ces deux angles de vue du capitalisme, l’auteur cherche à voir comment se situent les chrétiens, comment pensent et agissent ceux qui sont intransigeants, ou réformistes, ou encore conciliateurs. En prenant connaissance de cette typologie, le lecteur est lui-même amené à s’interroger sur sa propre position.
Mais après avoir mis le doigt sur le malaise d’une possible contradiction, Jacques-Benoît Rauscher invite à dépasser ces clivages, en s’appuyant sur la pensée de saint Thomas d’Aquin. Les intellectuels chrétiens devraient apporter leur pierre aux réflexions actuelles sur l’organisation du monde économique, en ne lâchant rien sur le message de l’Évangile et sur la critique de l’ethos du capitalisme, tout en reconnaissant que, dans le monde présent, il peut se justifier et même contribuer au bien commun.
Ce petit livre, d’accès aisé, aide à réfléchir et ouvre des portes.
Arnaud Laudenbach