éditions Charles Léopold Mayer, 2020
282 pages
lu
Métamorphoses de la responsabilité et contrat social
Les thèses discutées lors de l’Assemblée mondiale de citoyens réunie en 2001 seraient-elles les prémices d’une nouvelle définition de la responsabilité ? Pierre Calame nous montre qu’elles rejoignent en effet des revendications sociétales d’une responsabilité étendue devant les enjeux globaux de la crise écologique et sociale. Qu’elles sont portées par de nombreux usages novateurs du droit, soulignés par deux professeurs du Collège de France : Mireille Delmas-Marty (dont il faut lire l’excellente préface) et Alain Supiot, abondamment cité. Des juges reconnaissent de plus en plus une responsabilité objective élargie associée au pouvoir de chaque acteur individuel et collectif. La responsabilité limitée des sociétés, concédée par les rois pour financer l’aventure coloniale, est de plus en plus contestée par les tribunaux – et par les difficultés à recruter des jeunes, comme l’avait déjà fait remarquer Marc Fleurbaey. Déjà, le principe de précaution étend la responsabilité environnementale dans l’espace et dans le temps. Les limites objectives de la planète rendent nécessaire une obligation de résultats et pas seulement de moyens.
Tous ces changements exigent des révolutions coperniciennes que le livre détaille avec pédagogie. Car notre droit repose sur une conception dépassée de la propriété et de la souveraineté. Un ouvrage précédent avait montré l’importance de quitter le paradigme libéral de l’économie pour retrouver celui de « l’œconomie », c’est-à-dire le soin de la maison commune. Ce nouveau livre esquisse les métamorphoses d’une gouvernance multiniveaux et l’émergence d’un droit commun à l’échelle de la planète. L’auteur en fut le témoin privilégié quand il travaillait au ministère de l’équipement puis quand il présidait la fondation Charles Léopold Mayeur et l’Alliance pour des sociétés responsables et durables.
Certes, le lecteur peut être inquiet des régressions politiques du populisme. Pierre Calame invite à les lire comme des régressions qui accélèrent la prise de conscience mondiale des défis, notamment par les jeunes générations.
Bertrand Hériard, aumônier national