Annelise Lallemand Tixier
Boulangère paysanne
Annelise Lallemand Tixier
Boulangère paysanne
témoignage
De la faculté de droit à la boulangerie paysanne : une longue quête de sens pour Annelise Lallemand Tixier
Après une formation de juriste spécialisée en droit de l’environnement, la jeune femme s’installe en 2016 en Bretagne comme directrice du développement territorial d’une commune de 23 000 habitants. Commence alors une longue quête de sens et de découverte progressive de son « désir profond », désir qui la conduira vers la boulangerie paysanne… mais sans tenir compte alors de l’arrivée des enfants.
En parallèle de mon entrée dans le monde professionnel, j’ai pris des engagements associatifs, notamment auprès d’une exploitation maraîchère biologique, à vocation d’insertion sociale et professionnelle. Je me posais beaucoup de questions et me suis formée aux enjeux de la transition écologique et sociale. En 2019 j’ai rejoint le centre jésuite de Penboc’h, pour participer, entre autres, au « verdissement » du centre. La dimension spirituelle est en effet centrale dans mon cheminement. J’ai eu le temps de réfléchir à la suite, en lien avec mon mari rencontré dans le cadre des activités du centre.
La transformation du blé en pain : des compétences techniques pour métier exigeant
Début 2021, j’ai démarré une formation à la boulangerie paysanne, pratiquée dans des fermes paysannes biologiques. J’avais le souci de suivre toute la chaîne de transformation du blé en pain : les cultures céréalières, la meunerie, la boulangerie et la vente. J’étais sensible à l’aspect spirituel du pain, fruit du travail des hommes, qui se partage. J’ai passé un CAP de boulangerie à Vannes puis un BPREA[1] dans le Jura. Je faisais alors mes stages dans une ferme en Isère spécialisée dans l’élevage de chèvres, la culture des céréales et la transformation en pain et fromage de chèvre. Pendant toute cette période de formation et de stages, j’ai acquis de nombreuses compétences. J’ai aussi mesuré l’ampleur et la difficulté de cette activité plurielle et technique, si éloignée de mon milieu citadin d’origine.
De retour à Paris fin 2022 un peu avant la naissance de notre fille, j’ai pris un peu plus d’un an pour m’occuper d’elle à temps plein. En février 2024, profitant de la souplesse horaire de mon mari en télétravail, j’ai accepté un CDD de six mois à temps partiel dans une ferme en Touraine. Mes missions étaient principalement au fournil et à la meunerie. Je n’ai malheureusement pas pu progresser sur la partie agricole de l’activité qui m’intéressait autant
Une nouvelle quête : l’équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle
J’ai pris conscience de la difficulté de concilier vie professionnelle et vie familiale avec ce métier très fatigant et très physique. Aujourd’hui enceinte de notre deuxième bébé, je fais une pause professionnelle, avec le désir de prendre le temps de m’occuper de mes bébés durant les débuts de leur vie. Pour la suite, il va me falloir trouver une voie prenant plus en compte ma situation actuelle. Peut-être cela passera par un nouveau changement d’orientation, j’ai besoin de temps pour mûrir ce projet, heureusement soutenue par mon mari.
Un autre nouveau départ douloureux, mais facteur de croissance
Je suis donc une nouvelle fois en questionnement. Je reconnais qu’il est difficile de repartir de zéro quand on a 35 ans. Mais cette deuxième grossesse, tout à fait voulue, me permet de faire un travail d’approfondissement sur moi, parfois douloureux, enrichi d’une dimension spirituelle. C’est l’occasion de grandir en humanité, d’avoir une meilleure connaissance de moi, de mes limites mais aussi une maturité nouvelle.
J’ai été par ailleurs très heureuse de faire cette formation. J’ai éprouvé la joie de voir concrètement l’aboutissement de ce travail et la satisfaction des clients qui achetaient mon pain. J’ai rencontré des gens très variés, issus d’un monde bien plus ouvert que celui dans lequel j’évoluais auparavant.
Propos recueillis par Solange de Coussemaker
[1] Brevet Professionnel Responsable d’Entreprise Agricole.