Puf, 2017

268 pages

lu

Les batailles du dimanche

Jean-Yves Boulin | Laurent Lesnard

Comment un compromis construit pendant des siècles et juridiquement stable depuis plus de quatre-vingts ans a-t-il pu faire l’objet d’une telle controverse ? Sous prétexte de fluidifier le marché du travail, les lois Maillé et Macron ont contribué à fragiliser le dimanche, jour de synchronisation de la vie familiale et sociale.

Mais quel est le poids de l’argument micro-économique dans un pays avec peu de croissance ? L’avantage comparatif donné à une enseigne qui ouvre le dimanche est perdu dès que la concurrence s’y met. Les études internationales concluent rarement sur la création d’emplois, sauf dans les régions hautement touristiques. Or les conséquences pour les salariés contraints sont d’autant plus délétères qu’elles touchent souvent les plus précaires : dilution des liens familiaux, amicaux et sociaux, avec, en particulier, des conséquences directes sur l’éducation des enfants. Les auteurs entrevoient une société duale où une partie de la population imposerait des miettes d’emploi et des structures temporelles éclatées sur l’ensemble des vingt-quatre heures et des sept jours de la semaine. Un tel scénario serait aggravé par le développement de l’économie à la demande gérée par des plateformes dont Uber est le symbole.

La démonstration est précise, même si le ton peut paraître parfois péremptoire. Elle nous permet de réfléchir au monde que nous voulons, en touchant au jour de repos que toutes les sociétés humaines ont érigé pour se protéger de l’accélération. En ce sens, le dernier chapitre envisage d’autres activités pour le dimanche à partir d’une vaste enquête menée à Brive-la-Gaillarde (Corrèze). Beaucoup de Français, en effet, ne considèrent pas la consommation comme un loisir au même titre que l’accès aux équipements sportifs et culturels.

 

Bertrand Hériard-Dubreuil

 

Chronique publiée une première fois dans Projet

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