Oui, il est possible d’être un dirigeant d’une grande multinationale et de ne pas perdre son âme, de permettre d’avancer vers une entreprise où économique et social sont les deux facettes d’une même réalité.
Le livre d’Emmanuel Faber nous fait entrer dans l’intimité du vice-président de Danone, un des acteurs, sinon le principal, de Grameen-Danone au Bangladesh, d’un fonds doté de 100 millions d’euros ( 20% des dividendes de 2008) pour renforcer l’emploi de 500 000 personnes, de la chaire « Entreprise et pauvreté» à HEC co-présidée par Mohamed Yunus et Martin Hirsch, du fonds Danone pour la nature, promoteur de Moosteki au Sénégal (un produit hypervitaminé à très bas prix et réalisé exclusivement avec des produits locaux), et de bien d’autres réalisations, mais aussi capable de jouer du piano pendant une négociation difficile ou pour la fête de la musique devant des employés de Danone…
Voilà un dirigeant à la fois efficace et utopique, manager et dissident, marqué par la lecture de Kant, de Lévinas, de Christian Bobin, qui participe au forum social mondial pendant que son patron, Franck Riboud, est à Davos… Qui sait s’interroger sur l’économie d’aujourd’hui, sur sa rémunération et ce qu’il en fait, proposer des solutions.
Un autre monde est donc bien possible si on arrive à réconcilier entreprise, clients, fournisseurs, avec l’utopie de travailler ensemble pour un monde plus juste, dégagé de la dictature de l’argent et du court terme. A chacun de nous de trouver comment y participer.
Bernard Chatelain
Chemins de traverse; vivre l’économie autrement
Emmanuel Faber, Albin Michel 2011, 222 pages – 18 €