Les États généraux de la bioéthique sont clos. Pilotés par le Comité consultatif national d’éthique, ils ont été menés dans les régions au travers de débats portant sur les neuf thèmes proposés à la réflexion : de l’intelligence artificielle aux neuro-sciences en passant par la génomique*.

Comme attendu, ce sont les rencontres autour de la procréation et la fin de vie qui ont davantage mobilisé. Par ailleurs, de très nombreuses associations ont été auditionnées et un site participatif a permis la libre expression des internautes.

Il est clair que les sujets plus scientifiques n’ont pas réuni les foules. Ces États généraux ont aussi permis aux « militants » de tous bords de faire entendre leur voix. Même réussies, ces rencontres n’ont toutefois touché qu’une faible partie de la population. Le grand public, celui que l’on interroge dans les sondages, aura-t-il enrichi sa réflexion ?

L’exercice a néanmoins permis de vérifier que, sur plusieurs questions, il n’y a pas de consensus, mais des positions antagonistes qui laissent penser qu’il ne pourra y avoir, lors de la discussion parlementaire, le « débat apaisé » que souhaitait le président de la République. S’est fait jour également une sorte de méfiance, d’inquiétude à l’égard d’une médecine qui perdrait sa finalité. Les inégalités devant l’accès aux soins, face à la mort et aux nouvelles thérapeutiques ont traversé les débats, appelant à une relation médicale vraiment humaine.

C’est au tour des législateurs désormais de tirer de ces débats, mais aussi des réflexions d’instances scientifiques ou juridiques, les points de la loi qu’il faudrait modifier. Rude tâche que d’affronter les tensions éthiques que soulèvent ces questions : respect de l’autonomie de la personne, de sa liberté et intérêt du collectif ; souci d’une « éthique à la française » encadrée et volonté de concurrencer sans entrave les recherches menées à l’étranger ; définition des priorités dans un système de santé économiquement fragile qui ne peut ouvrir de nouveaux droits sans se poser la question de savoir qui pourrait en pâtir… Tensions qui peuvent et doivent traverser chacun de nous dans sa propre réflexion.

Dominique Quinio, membre du Comité consultatif national d’éthique et présidente des Semaines sociales de France

* Article écrit avant la publication de l’avis 129 « Contribution du Comité consultatif national d’éthique à la révision de la loi de bioéthique 2018-2019 » le 25 septembre

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